C’est la DARES (direction de l’animation de la recherche, des études et de la statistique) qui vient de publier les chiffres, et ce sont des chiffres officiels. Chiffres est un abus de langage, car ce sont des nombres, et des grands : la France compte pas moins de 6 618 600 demandeurs d’emploi en juin 2017, dont 3 213 200 sont indemnisés chaque mois, soit un demandeur sur deux.
On ne voit pas alors pourquoi on nous serine le chiffre de « trois millions de chômeurs » et quelques, même si on sait qu’il s’agit de la catégorie A. On ne va pas recopier toute l’étude du Pôle Emploi qui précise par catégories les Français en recherche d’emploi : par âge, sexe, région, durée, etc.
L’organisme ne compte pas, en outre, les Français qui ne croient plus au Pôle Emploi, et qui disparaissent des radars sociaux. Beaucoup sont écœurés par l’infantilisation et la soumission qui sont exigées pour le traitement d’un dossier. Si l’on comprend qu’il faille voir régulièrement son « agent » traitant, l’efficacité médiocre de l’organisme public donne à réfléchir. Mais ce n’est pas le débat du jour.
Si l’on avait ne serait-ce qu’un ou deux millions de chômeurs en moins, c’est-à-dire de travailleurs en plus, les comptes sociaux pourraient sortir du rouge. Pourtant, ce qui se profile, ce n’est pas l’augmentation du nombre d’emplois, mais la baisse des indemnisations. La paire Philippe-Macron ne s’en est pas cachée : on file vers un système à l’anglaise avec un suivi plus serré, une indemnisation plus forte, mais aussi moins durable. Fini le chômage longue durée, et bonjour les formations.
Mais là aussi, le bât blesse : la formation la française est un foutoir sans nom. Le plus sérieux y côtoie le plus loufoque, quand ce n’est pas le plus bidon. Les chômeurs longue durée ne sont pas sortis de l’auberge. Le système social français est montré du doigt par tout le monde, à droite comme à gauche, exception faite des « extrêmes », qui tiennent à le protéger des rapaces ultralibéraux.
Selon ces derniers, le social grève l’économie. Les ennuis viendraient de trop de social. Or l’argent que la France n’a pas, et pour lequel elle s’endette chaque mois sur les marchés, ne vient pas de là. Il vient du déficit du commerce extérieur, et de tout l’argent qui sort de France : investissements, tourisme, retraites (à l’étranger) mais surtout, achat de produits pas chers dont la conséquence cachée est la destruction de l’emploi local. On appelle ce dernier poste les importations.
Le bas coût d’un produit acheté à l’étranger (et généralement fabriqué par des ouvriers pauvres non couverts socialement) a donc un coût caché que l’État est obligé, in fine, de compenser. Eh oui, rien ne se perd, mais rien ne se gagne non plus à coups de baguette magique. Ainsi que l’écrit La Croix du 26 juin 2017 :
Il est dit que les retraites et le chômage constituent une dette pour la France. C’est faux. Les pensions de retraite et le chômage rallongent la circulation monétaire mais ce n’est pas une dette financière. Ainsi un billet émis par une banque passe de la main d’un investisseur, à celle d’un fournisseur, puis un salarié, puis un boulanger, un boucher, un épicier ainsi de suite jusqu’à ce qu’une personne épargne ce billet ou le sorte du pays. S’il y a un retraité ou un chômeur dans le circuit cela rallonge la longueur du circuit mais cela n’est pas une dette. Une dette consiste à injecter de l’argent frais dans le circuit pour faire face aux investissements ou compenser les sorties. C’est pourquoi, l’effort réalisé par les actifs pour avoir une protection sociale de qualité est une charge en apparence seulement. En réalité les retraités réduisent le nombre d’actifs et augmentent le nombre de consommateurs. Cet effet ciseau est une opportunité pour les actifs qui bénéficient d’un marché de l’emploi plus dynamique. Malheureusement ce cercle vertueux ne marche pas car trop d’argent sort du pays et ce qui devait constituer une opportunité est devenu une dette. Je suis intimement convaincu que la cause du chômage de la France provient des sorties financières excessives et non d’un Code du travail trop contraignant. Pour preuve les pays qui n’ont pas de déficit ont très peu de chômeurs, l’Allemagne par exemple, et les pays du sud qui le réduisent voient leur chômage baisser.
Dans l’argent qui est récupérable, il y a, ne l’oublions pas, toute l’évasion fiscale des grandes sociétés, une fraude quasi légale due à ces cabinets de fiscalistes qui maîtrisent leur droit international sur le bout des doigts crochus. C’est tout l’objet de cette petite vidéo du lanceur d’alerte des LuxLeaks Raphaël Halet :
Ces 80 milliards feraient du bien à la France ! Ce n’est pas le système social qui plombe notre pays, mais bien ce système asocial.